Compte rendu de notre conférence
Le 21 mars dernier, l’Académie des controverses et de la communication sensible organisait un séminaire en ligne sous le thème du greenwashing. Près d’une soixantaine d’auditeurs ont pu observer ces échanges offrant un regard international sur le greenwashing, rendu possible grâce à une diversité d’intervenants en provenance de la Suisse, de la France, du Québec, du Maroc et de la Belgique.
Anne-Marie Cotton de l’Université de Gand a ouvert la discussion en nous expliquant que bien que les citoyens belges s’intéressent beaucoup au changement climatique, ils ont du mal à trouver des informations fiables. En réponse, le gouvernement belge a créé le site climat.be. Cela dit, il va sans dire que le problème de l’écoblanchiment subsiste et représente un frein à la transition vers une économie plus durable. Le gouvernement a ainsi envisagé plusieurs mesures pour mieux informer les consommateurs, telles que la création d’un score de réparabilité des produits, une certification fiable du contenu recyclable et l’obligation de fournir des informations sur les mises à jour de logiciels à des fins de recyclage. Le gouvernement met également en garde les consommateurs contre les pratiques de greenwashing en donnant des trucs et astuces pour mieux le repérer. Par exemple, ces compagnies utilisent souvent des termes vagues et généraux donnant l’impression de ne pas avoir d’impact négatif sur l’environnement. Madame Cotton conclut en présentant diverses initiatives permettant aux médias, aux citoyens et au gouvernement de mieux se renseigner sur ces pratiques.
Albin Wagener, enseignant-chercheur en analyse de discours, affilié à l’Université Rennes 2 et à l’INALCO, nous a ensuite parlé de l’écoblanchiment et de ses impacts en France. Les effets négatifs du greenwashing sont nombreux, notamment une perte de confiance et de crédibilité, en plus d’une perception de tromperie. Monsieur Wagener poursuit avec les mesures spécifiques en France, en présentant l’Agence de la transition écologique (ADEME), chargée des questions environnementales sur le territoire. L’ADEME dispose notamment d’un outil en ligne permettant aux consommateurs français de vérifier si une activité est respectueuse de l’environnement ou non. Au niveau légal, il existe également la Loi sur le climat et la résilience, adoptée en 2021, et qui vise notamment à prévenir le greenwashing.
Ambre Creux Martelli, étudiante à la maitrise à l’Université de Québec à Montréal, nous a présenté son projet de recherche sur le discours de la mode durable, en se concentrant sur trois marques : Marine Serre, Ganni et Boohoo. Elle se questionne à savoir si la mise en discours de la mode durable relève de l’écoblanchiment. Pour ce faire, elle a mené une enquête de trois mois sur les comptes Instagram de ces marques et a comparé l’approche en matière de discours sur la mode durable. Quatre indicateurs ont été analysés : le champ lexical entourant la nature, l’utilisation de la couleur verte, l’utilisation d’écolabels, de fake labels ou d’appellations créées par la marque et un visuel qui inclut des photos de paysage ou encore de la nature de la nature. Les résultats permettent de conclure que les stéréotypes visuels et textuels associés à l’écoblanchiment sont effectivement réutilisés de manière décomplexée par des marques au modèle d’affaires le plus durable.
Julien Intartaglia, doyen de l’Institut de la communication et du marketing expérientiel et professeur ordinaire HES à la HEG Arc Neuchâtel en Suisse nous a présenté une étude de cas sur l’écoblanchiment en Suisse. Il nous réfère ainsi à une enquête réalisée pour le Crédit Suisse en 2022, qui révèle que 39 % des citoyens suisses sont préoccupés par l’environnement. Le greenwashing fait également l’objet d’un encadrement au niveau légal, via une loi qui permet de contrer la concurrence déloyale. Cette loi permet d’infliger une amende aux entreprises qui communiquent des informations inexactes ou trompeuses par le biais de la publicité ou d’autres canaux de communication. Un consommateur peut également s’adresser à la Commission suisse pour la loyauté, qui elle peut exiger qu’une entreprise prouve l’exactitude de ses déclarations environnementales. Monsieur Intartaglia conclut en discutant de l’impact de la loi et des limites du pouvoir de la Commission.
Karine Johannes, de l’Université internationale de Rabat nous a parlé des spécificités du greenwashing au Maroc. Effectivement, le développement rapide de l’économie marocaine a entraîné des inégalités croissantes, notamment l’accès à l’éducation, à la santé et à l’emploi. L’aggravation des conséquences climatiques est un autre revers de ce développement rapide, alors qu’on assiste à une augmentation de l’empreinte écologique et une diminution de la biocapacité. Le Maroc a mis en place des moyens institutionnels pour répondre aux risques environnementaux, y compris la constitutionnalisation de l’environnement et du développement durable comme étant des droits fondamentaux, la création d’un ministère de la Transition Écologique et du Développement durable, et la mise en place d’une Stratégie nationale de Développement durable pour passer à une économie verte et inclusive d’ici 2030.
Enfin, nous avons conclu ce séminaire avec madame Laetitia Montero, qui travaille pour le Programme des Nations Unies pour l’environnement. Elle débute en nous informant que bien qu’il reste beaucoup de travail à faire avant d’en arrivant à un cadre international, il existe quelques initiatives qui rassemblent divers acteurs de la société civile, notamment l’initiative One Planet Network. Madame Montero nous explique que quatre domaines principaux sont visés par cette initiative : les guides de bonnes pratiques contre l’écoblanchiment, les écolabels, la lutte contre l’obsolescence programmée et le soutien aux entreprises pour qu’elles communiquent leur impact environnemental sur la biodiversité.
Il est possible de réécouter ce séminaire en ligne, sur notre chaine Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=0IZJ0z-BsL4&t=1s