Cette communication vise à montrer comment les mots pour nommer des objets ou pour représenter une réalité ne sont pas neutres, mais reflètent des tensions entre différentes valeurs, témoignant des rapports sociaux de pouvoir.
À ce titre, les controverses, par la mise en scène de discours en confrontation, constituent un terrain privilégié pour l’observation de ces luttes pour l’imposition de mots (lexique) et de sens aux mots (sémantique) et des valeurs (principes axiologiques) qui sous-tendent ces choix lexicaux et sémantiques.
Pour illustrer notre propos, nous nous intéressons à une controverse environnementale autour du projet de l’entreprise canadienne TransCanada de construction d’un oléoduc pour transporter du pétrole qui devait traverser un écosystème marin sensible du fleuve St-Laurent, au Québec. À partir d’un corpus de presse (142 articles et 1 entrevue radio diffusée) allant du 13 novembre 2013, date de l’annonce du projet, jusqu’au 2 avril 2015, date de l’abandon, nous avons identifié 4 répertoires de dénomination (l’entreprise Transacanada, les actions posées par cette dernière, le projet en lui-même et les conséquences du projet).
Ces répertoires permettent de montrer par exemple que l’entreprise Transcanada se réclame être une entreprise de « transport de ressource naturelle » et non une pétrolière ou encore qu’elle n’effectue pas des « travaux » mais des « sondages géophysiques ». Ces stratégies de dénomination s’appuient sur des registres de valeurs (fonctionnel et technique par exemple) qui agissent comme des représentations collectives imposées et voulues comme objectives, nécessaires, rationnelles et universelles.